Le vendredi est jour de
marché.
La place se couvre de maints artisans :
coiffeurs rasant avec une lame «gilette » tenue à même les doigts,
forgerons travaillant assis et actionnant leur soufflet formé dune peau de chèvre,
couturiers taillant et cousant les tissus les plus divers ;
marchands deufs, de volailles, doignons , de chapelets de piments
rouges et
dépices aux senteurs et couleurs enivrantes.




Il y a aussi
Les «deguez » ou diseurs de bonne aventure qui lisent lavenir dans le sable
étalé devant eux
et sur lequel ils dessinent des signes cabalistiques,
Les écrivains publics qui sont légion autour du bureau de poste.
Le «Maghzen »qui nest autre que le policier en tenue kaki, venu du chef-lieu
Ebba-Ksour na guère à intervenir car tout est calme et le voici se désaltérant
au comptoir du café.



Le dimanche, aucune
distraction, que la lecture et la préparation du travail scolaire...
Le village est uniquement constitué par lécole, la poste, le café, les ponts et
chaussées
et la grand-place déserte tout au long de la semaine.
Alentour, des cailloux,
rien que des cailloux... qui abritent cependant serpents, scorpions et gros lézards
verts.
Mais, attention les serpents et les lézards ne font pas bon ménage... aussi, à chacun
son territoire
Le géomètre en chef
apprend au nouvel instituteur la façon de saisir un serpent
à laide dune petite fourche en bois.
Et voilà ! ...
La «piaule » du maître décole accueille bientôt plusieurs couleuvres
jaunes, vertes, à damiers
dépassant parfois le mètre de longueur ....
MAis....il faut les nourrir!
Les moineaux nichent sous le préau, le soir, notre «charmeur » muni dun
balai en paille et dune lampe à acétylène
part alors en chasse. Les oiseaux affolés par la lumière crue, voltigent en tout sens
et,
chaque coup de balai en abat plusieurs qui serviront de pâture aux captifs.
Finalement ces drôles de pensionnaires rampant sapprivoisent bientôt et
circulent librement dans le logement !
Cela peut bien entendu surprendre.
Voici la fin de lannée scolaire, les reptiles sont
rangés dans une grande caisse à thé, cube de cinquante centimètres darête, et
expédiés par le train avec les autres colis vers Tunis.
Il ramène aussi une sorte de grand
lézard à queue préhensile qui change de couleur par mimétisme :un caméléon que les
indigènes nomment «houm el bouya »(mère du père).
Mais, catastrophe les colis arrivent à
Fochville avant le maître !
Les parents non avertis et ignorant la nouvelle passion de leur fils ouvrent les caisses
croyant y trouver des eufs frais...
et, les couleuvres en sortent... 

Elles sont abattues sur-le-champ, à laide de cisailles de jardin
Lucien aura bien du mal à se résoudre de la perte de ses protégées.
Ses braves petites bêtes navaient même pas tenté de fuir ou esquisser une
quelconque forme de rébellion !
