"Promenades" de Lucien  .

Après Sbiba, les «chantiers de Jeunesse »
récupèrent le jeune diplômé
du 6 juillet 41 jusqu’au 31 janvier 42.

La Tunisie est occupée par les forces de l’Axe et, les «chantiers de Jeunesse » remplacent le service militaire et sont sous le contrôle
des diplomates signataires de l’Armistice.
Les fusils de guerre ont été rechemisés et ne tirent plus que du 22 mm (long-rifle) mais cela n’empêche pas les chants guerriers
où il est souvent question de revanche

Ces chantiers lui font découvrir la marche à pied
et la douche sous un filet d’eau de fonte des neiges.
Ils sont au Nord ouest de la Tunisie,
entre Tabarka se situant sur la côte
et Aïn Draham qui est le point culminant du pays.

Là, au Camp des Chênes, un officier forme les futurs chefs.
Tous campent sous des tentes individuelles, réunis par groupes de six. Ils couchent sur des matelas de fougères cueillies dans la forêt avoisinante.
Toujours plein d’imagination, une caisse en bois lui sert de boîte à

paquetage. Une petite couleuvre vipérine jaune à damiers noirs monte la garde. N’est-ce pas là une des meilleures protections contre la chapardise ?

Le dimanche, jour de repos on part à la cueillette de gros cèpes qui abondent dans la forêt de chênes du Méridj ; cuits sous la tente dans un plat de campement et sur un feu de bois, ils améliorent l’ordinaire.

La clôture du Camp des Chênes se termine,
le 31 janvier 1942  par une marche de 82 Km 500 en 24 heures,
sac au dos entre Aïn-Draham et Thibar où cette jeunesse est accueillie par les pères blancs qui leur offrent un vin de leur fabrication, vin renommé dans toute la Tunisie qui réconforte certains et en met d’autres au tapis.
Les élèves gradés sont ensuite dirigés sur Tabarka où chacun dirigera un groupe de jeunes recrues.

En octobre 1942 Lucien doit rejoindre Médenine, dans le sud tunisien
où il faut affronter des 45° à l’ombre le jour, 
puis  le froid (relatif) de la nuit...
et, le vent de sable qui s’introduisant partout
donne le privilège de goûter des repas sablés et repoussants.
Cependant, que les nuits sont claires, le ciel étoilé, et rayé d’une multitude d’étoiles filantes.

Les habitants de la ville occupent des «rhorfas », maisons formées de deux demi-cylindres juxtaposés et ces ensembles sont groupés autour d’une place centrale où a lieu le marché du vendredi.

Le titulaire du poste de Médenine arrive bien vite, dés le mois de novembre, en amenant une nouvelle nomination pour Lucien,...REMLA
De nouveau, grandes recherches sur les cartes... sans succès.

Enfin un ancien marin explique que ce village est situé dans une île : Kerkennah, située face à la ville de Sfax...

Une barque à moteur prend le passager à Sfax et le dépose aux îles Kerkennah...
Mais il faut un passeur qui prend le voyageur sur ses épaules pour lui éviter de marcher dans l’eau car, l’arrivée à marée basse ne permet pas à l’embarcation d’accoster au débarcadère Oued Kassem.
( Oui, nous sommes bien en Méditerranée mais en ce lieu particulièrement plat la marée est remarquable!).
Un chameau porte les bagages jusqu’à Remla,
au centre de l’île.
Là, le nouvel arrivant promu Directeur est accueilli par son adjoint. L’instituteur de Bou-Ali, un village proche, se joint à eux pour partager les repas et la demeure. A trois, la vie est simplifiée. Ils s’organisent car en janvier, les passages réguliers de la navette postale sont supprimés. Plus de pain. L’orge écrasée par Ali, le serviteur, permet la confection de galettes. Le menu s’agrémente de poissons et de poulpes que les indigènes font sécher après les avoir battus sur le sable à l’aide de «crosses » de palmier pour les attendrir.
L’eau potable provient uniquement de la citerne.

Kerkennah est peuplée d’indigènes dont plusieurs ont les yeux bleus car,
descendants d’anciens serviteurs du Bey  (Roi de Tunisie) et de favorites  (ex esclaves lors de prises de navires)
qui avaient déplu et étaient retenus prisonniers dans cette île...

Les habitants cultivent la vigne et recueillent le «lagmi », sève du palmier que l’on couronne en coupant les palmes du sommet ce qui met malheureusement aussi, l'arbre en grand danger ! ... Cette sève douce comme le miel et d’un aspect laiteux, fermente rapidement et donne un liquide fortement alcoolisé... qui permet de «faire la fête »...

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Le poisson ne manque pas car, autour de l’île  sur un versant sablonneux, les indigènes ont installé des pêcheries.
Ce sont des palmes enfoncées dans le sable, formant un triangle dont la base se trouve vers la plage.
En mer, la pointe est un treillis de roseaux terminés par une nasse.
En cette région méditerranéenne, la marée très importante découvre des centaines de mètres de sable.
A marée haute, les poissons remontent avec le flux et redescendent à marée basse lors du reflux en suivant les palmes pour aboutir dans la nasse où les riverains les recueillent chaque jour. Ils creusent aussi des pierres tendres, les descendent en mer au bout d’un cordage terminé par un flotteur en liège. Les poulpes viennent s’y réfugier...
IL suffit alors de remonter le tout...
La mer nourrit ces pêcheurs sans efforts et sans danger.

Les Européens de l' île, tous instituteurs, sont tenus au courant des événements par le directeur régional en liaison radio constante avec le continent. Ils apprennent ainsi que l’armistice est rompu et décident alors de repartir sous les drapeaux
les uns rejoignant la France libre de Leclerc et les autres, l’armée régulière.