VOILA LE BOUSSAADIA !
LE VOILA ! …


Pas
de portable en ce temps là … pas même de téléphone …
mais seulement « le téléphone arabe »...
et tout le village accourait sur la grande place…
Les femmes européennes avec leurs petits
enfants, les mauresques cachées dans leur "gandoura"
et portant leur plus petit accroché sur le dos par une pièce de tissus, et
toute une marmaille d’enfants étaient là réunis … Le spectacle pouvait
commencer.
Le
boussaadia avait annoncé son arrivée par un « boum, badaboum, boum,
badaboum » particulièrement retentissant, et devant nous, se tenait à côté
de son bourricot bien maigre, un homme couleur d’ébène qui nous fascinait.
Son pantalon large était un sarouel bouffant couleur de terre, serré à la
hauteur des mollets, il portait une sorte de chemise s’apparentant à une
djellaba courte . Une étrange ceinture lui serrait la taille. Tout un tas
de gris-gris y étaient attachés.
Des queues de lapin, de fennec, de chacals, des dents et des breloques
diverses tintinnabulaient au moindre de ses gestes. Son chapeau de paille
tressée miroitait de mille feux car des petits miroirs reflétaient le soleil
de tout côté. Pour compléter son accoutrement il était chaussé de drôles de
babouches de caoutchouc découpées dans des vieux pneus et assemblées avec
de la grosse ficelle.
Sa
"darbouka" qu’il tenait en
bandoulière lui permettait de battre la cadence … Une cadence infernale. Au
roulement du tam-tam se mêlaient de multiples sons qu’il émettait en
grimaçant et que personne ne comprenait, mais qui allaient du plus grave au
plus strident. Et le Boussaadia tout en gesticulant dansait, sautait,
bondissait, tournoyait, en effectuant des figures acrobatiques insolites .
Il
se mouvait avec une extraordinaire souplesse et à la fois perplexes,
émerveillés et quelque peu apeurés nous restions là dans une extase, hors
du temps !
La
représentation terminée, il était de coutume de remercier le danseur avec
quelques petites pièces ou quelques dons : des œufs, des oranges, des dattes
de la semoule …
Il rangeait son « fourbi » dans les sacs de jute portés par son petit âne et
repartait,
la mine heureuse, pour un autre village.
La
fête était terminée mais dans nos jeux, durant quelque temps il était
souvent question d’imiter le boussaadia.
Ce
mot, résonnait en nos têtes comme une musique pleine de magie… mais il faut
bien dire que Bou Saada est un lieu magique… ; une oasis algérienne au sud
de Biskra dont le nom se traduit par : « le Père du Bonheur ou la Cité du
Bonheur » !